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Du sort des sûretés en cas de caducité d'un accord de conciliation à la suite de l'ouverture d'une procédure collective

Affaires - Commercial
02/10/2019
En 2005, une banque a consenti à une société une ouverture de crédit de 350 000 euros et un prêt de 800 000 euros. Le dirigeant de la société s’est porté caution solidaire de la société dans la limite, respectivement, de 260 000 euros et 160 000 euros. En 2008, en raison de difficultés financières, la société a bénéficié d’une procédure de conciliation ayant abouti à abaisser les créances à 140 000 et 325 418,68 euros et la limite de la caution à 182 000 et 325 419 euros. De même, le dirigeant s’est porté caution pour un montant de 130 000 euros d’un billet à ordre de 200 000 euros, ramené à 100 000 euros. Étant toujours en difficultés, un redressement puis une liquidation judiciaire ont été prononcés. Le dirigeant a été poursuivi par la banque en exécution de ses différents engagements.
 
L’arrêt d’appel ne contente personne puisque tant la banque que le dirigeant forment un pourvoi en cassation.
 
La première reproche à la cour d’appel de ne pas avoir confirmé le jugement de première instance condamnant le dirigeant à payer 115 894,89 euros pour l’ouverture de crédit, 291 648,46 euros pour le prêt et 90 115,63 euros pour le billet à ordre. Les juges d’appel retiennent en effet que l’accord de conciliation homologué avait rendu caduc, en tant qu’accessoires, les engagements de sûreté. La banque estime en outre que les juges d’appel ont violé la clause contractuelle du cautionnement précisant que « le présent cautionnement s'ajoute ou s'ajoutera à toutes garanties réelles ou personnelles qui ont pu ou qui pourront être fournies au profit de la banque par la caution, par le cautionné ou par tout tiers ».
 
La chambre commerciale s’est donc interrogée sur les conséquences de l’ouverture d’une procédure collective sur un accord de conciliation préalable.  
 
La Cour de cassation rejoint la position de la cour d’appel. Elle se fonde sur l’article L. 611-12 du Code de commerce qui dispose « lorsqu'il est mis fin de plein droit à un accord de conciliation en raison de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de  redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire du débiteur, le créancier qui a consenti à celui-ci des délais ou des remises de dettes dans le cadre de l'accord de conciliation recouvre l'intégralité de ses créances et des sûretés qui les garantissaient, il ne conserve pas le bénéfice des nouvelles sûretés obtenues dans le cadre de l'accord ». En l’espèce, « les engagements de caution du 15 juin 2008 avaient été consentis en contrepartie des abandons de créance dans le cadre du même accord de conciliation, l'arrêt retient exactement que l'échec de cet accord a entraîné la caducité de celui-ci dans son intégralité, qu'il s'agisse des abandons de créances comme des engagements de caution ». Pour déterminer l’étendue des engagements du dirigeant, il convient donc « de se reporter aux deux cautionnements initiaux du 3 mai 2005, sans que la banque puisse opposer les stipulations contraires des engagements du 15 juin 2008, devenus caducs ».
 
Le pourvoi incident du dirigeant porte sur la demande en indemnisation. Les juges du fond avaient en effet estimé que le dirigeant n’étant pas débiteur principal, il ne bénéficiait pas de la qualité pour invoquer une faute de la banque dans le cadre de la procédure de conciliation. Aucune demande n’avait été formulée à ce titre par la société.
 
La Cour de cassation devait ainsi répondre à la question de savoir si un dirigeant caution avait qualité pour demander des dommages et intérêts au créancier.
 
La Haute juridiction civile répond par l’affirmative. Elle considère succinctement que « la caution peut demander au créancier réparation du préjudice personnel et distinct qu'elle impute à une faute de celui-ci commise dans ses rapports avec le débiteur principal ».
 
Source : Actualités du droit